Avant même de lire la suite, vous vous demandez forcément : mais qu’est-ce que s’est que ça Charnégou ou Xarnegu (en basque) ? C’est un pays. C’est là où j’ai passé une semaine au début du mois d’octobre. C’est la partie du Pays-Basque la plus au nord. Il y a ici une forte identité et un mélange avec la proximité de villages gascons. Charnégou ça veut dire métis, c’est à la frontière des autres départements. Exactement, c’est à Bidache que j’ai travaillé, plus précisément dans le collège.
C’est souvent dans les projets les plus flous qu’on y voit le plus clair. Je suis arrivé dans la brume la plus obscure, toujours avec le sourire, et je suis reparti le menton vers les étoiles avec mon sourire encore plus marqué et surtout le cœur rempli de souvenirs ineffaçables.
Ce projet, j’en suis particulièrement fier. Je suis de nature très optimiste (parfois trop) mais quelques jours avant d’arriver sur place je me posais la question : à quelle sauce j’allais être mangé. Croyez-moi, ça valait vraiment le coup.
Le collège de Bidache est un petit collège de campagne. Il est incroyable. Les bâtiments tout neuf encerclent la cour de récréation. D’un côté il y a la vie scolaire, l’administration, d’un autre les salles de classes, puis celle d’étude, de musique et d’art plastique. Il y a beaucoup de gris sur les murs même si quelques portes au fond du préau sont colorées. Trois vignettes en hauteur attendent les bras croisés l’arrivée d’un artiste talentueux et généreux. J’espère avoir au moins une de ces deux qualités pour répondre de manière positive à l’invitation. Après quelques incompréhensions de mise en route, nous voilà lancé.es. Lorsque je suis arrivé dans l’établissement, le projet n’était pas encore bien ficelé. Trois jours avant, j’ai eu Laura au téléphone, la prof d’art plastique pour s’accorder sur le processus de création. L’idée principale est de faire participer tout le collège. Je me suis alors laissé guider au fil des heures et des jours par tous les élèves. C’était incroyable. Vraiment.
Cette aventure est partie d’un prix coup de cœur du département décerné à une élève qui a dessiné le nouveau logo de son collège. Une somme a été attribué à l’association Space Junk pour qu’elle déniche l’artiste qui saura répondre à la demande et qui sera dans son élément. Cet artiste, vous l’aurez compris, c’est moi.
Le logo de l’élève a changé de visage. L’élève aussi quand elle a vu le résultat. Il s’est clairement métamorphosé jusqu’à devenir des tâches de couleurs et des traits qui tapissent maintenant les murs de l’école. J’ai souhaité prendre le temps de rencontrer le plus d’élèves possibles pour leur expliquer la démarche et qu’ils.elles s’approprient le contenu. Mission accomplie et surtout semaine inoubliable pour les deux camps.
La liste de toutes les choses que j’ai vécue ici est longue et je ne suis pas prêt d’oublier tout ça. Lorsque je ferme les yeux et que je repense à mon intervention à Bidache, il y a le château qui m’a accueilli avec son sourire malicieux et un ciel nuageux remplis de larmes. Mais avant toute chose, ce que je retiens c’est la cantine avec vue, le rire des élèves qui m’attendent le matin au portail ou plutôt mon sourire qui attend ces mêmes élèves au même portail… Pour rien au monde j’aurais loupé ça. Il y a aussi les longues discussions avec la CPE avant la fameuse arrivée des jeunes plein d’énergie quel que soit le jour de la semaine, les dessins et déclarations sans fin, ma chambre cinq étoiles, mon bureau d’une semaine, les repas, les parties de foot improvisé à la récré, les km de podcast qui accompagnent mes moments seuls, la peinture sur le sol et les murs, les recherches au CDI, les longs moments de création, les cours instants de doutes, la joie de la principale, les retours positifs, le café du matin au Xarnegu (encore un), les élèves qui attendent le bus, celles et ceux qui montent dans les arbres, le soulagement d’avoir fait le plein de ma petite voiture, les routes nationales que j’emprunte pour rentrer chez moi avec des images plein la tête, le binôme d’attaque inébranlable que j’ai formé avec Laura, les temps d’écritures, les échanges avec les profs, la présentation des différentes maquettes auprès de la vie scolaire… et tant de choses encore qui resteront marquées ici ou là dans mon cœur.
Merci Bidache, merci au pays Charnégou… je ne vous oublierez pas.
Oh lala quelle tâche ingrate de me lancer dans une farandole de remerciements pour un tel projet.
Avant d’oublier, je vais débuter cette longue liste par les partenaires sans qui je n’aurais pas été présent sur cette aventure. Merci au département des Pyrénées-Atlantique (64) et l’association Space Junk basée à Bayonne pour avoir cru en moi et m’avoir mis sur ce projet. Objectivement, je ne vois pas à qui d’autre on pouvait confier cette tâche ahah
Merci mille fois à la direction de l’établissement, la vie scolaire et toute l’équipe. Bravo à vous et à nous. Nous avons fort géré et de l’extérieur, nous aurions pu croire que nous avons mis une année pour mettre ce projet en route et que ce n’est pas le premier que nous mettons en place ensemble. Nous pouvons dire que nous formons une belle équipe.
Merci à tout le corps enseignant, professeur.es de tout l’établissement pour être venu.es à mes ateliers. Avec si peu de préparation, je trouve qu’on ne s’en est pas trop mal sorti.es. Merci pour l’accueil et les félicitations. Merci pour les échanges, la flexibilité et l’adaptation commune.
Merci aux deux merveilleuses agentes d’entretien, c’était trop chouette de vous avoir à mes côtés. Merci aussi cantinier.es et cuisnier.es.
Un big up à Rémi Tournier mon ancien binôme qui travaillait à Bardos à quelques kilomètres de là en même temps que moi, bravo pour son taf que vous pouvez allé découvrir à la laiterie Ekia Za Etxecolu et pensée à sa stagiaire d’une semaine, la merveilleuse Lucie.
Enfin, je tiens à faire la plus grosse des dédicaces à tous les élèves sans exception de la 6ème à la 3ème vous êtes magnifiques. Vous allez beaucoup me manquer. J’ai tellement aimé passer du temps avec vous. Si j’avais pu vous mettre dans ma petite voiture rouge, ça aurait été avec plaisir.
Ah si, vous ne pensiez tout de même pas que j’allais oublier la meilleure des partenaires : Laura, la prof d’art plastique. Quand tu veux on remonte un projet ensemble et avec un immense plaisir. Prends soin de toi et continue d’exercer ton métier avec passion. J’imagine à quel point c’est difficile et ça ne tient qu’à moi d’affirmer que tu es un maillon essentiel dans la chaîne de l’enseignement. Je rêve d’un système scolaire qui en prend réellement conscience. Merci à toi.
LAURA CARDONNE Professeure Art Plastique, collège de Bidache (64)
« Tout d’abord, ce fut une expérience que je qualifierai de très enrichissante pour le collège dans son intégralité (pour les élèves évidemment, mais aussi pour les professeurs, les agents, l’administration), mais aussi comme une franche et belle réussite.
Tu as réussi quelque chose d’assez exceptionnel, c’est de faire participer tout le monde (de près ou de loin) à un même projet. Aussi, je pense que tous ont appris quelque-chose (sur l’art, sur eux, sur la vie…) et ont créé d’une certaine façon. Chacun a été un maillon d’une grande chaîne qui a permis la réalisation de plusieurs créations artistiques. Chacun a eu sa place, personne n’a été mis de côté. Voici, à mon sens, la vraie plus-value de ce projet.
Personnellement, mis à part les problèmes d’organisation et d’accueil, j’ai extrêmement bien vécu le projet et suis très heureuse de ce que nous avons réussi à mettre en place en si peu de temps.
J’ai apprécié ne pas avoir uniquement un rôle d’encadrante, j’ai apprécié nos échanges, ta capacité à improviser et à aborder des thématiques très diverses. J’ai adoré ta façon très ludique de parler du monde de l’art (trop souvent perçu comme ennuyeux et poussiéreux) et aussi cette manière que tu as de lier l’art à la société (en parlant du métier d’artiste, en abordant certains combats de tous les jours, en évoquant l’art-thérapie …). Je me suis beaucoup retrouvée dans ta façon de travailler, mais j’ai aussi appris de mon côté, et ça c’est génial, car nous sommes tous d’éternels élèves.
Je trouve le côté « process » de ta pratique très intéressant, créer n’est pas simplement réduit à un résultat. La solidarité, l’égalité, la coopération et l’entraide étaient au cœur de cette semaine. Il a aussi fallu laisser place à l’improvisation et à l’interprétation. Certains ont peint, d’autres ont réfléchi, discuté, accroché, nettoyé… Toutes ces étapes furent utiles et variées.